Intéressons nous aux usages politiques et sociaux du son. De nouvelles armes, dites soniques ou acoustiques équipent les polices, les armées, les commerces et même les particuliers de divers pays. Tour d’horizon de la panoplie existante, depuis les armes infrasoniques, en passant par les fréquences moyennes & la musique et jusqu’aux très hautes fréquences et aux ultrasons, majoritairement employées dans le domaine sécuritaire. Et premières ébauches d’une résistance sonore.
« Les oreilles n’ont pas de paupières » [2] : aspects techniques de l’audition
Considérée d’un point de vue guerrier, l’oreille est une cible vulnérable : on ne peut pas la fermer, on ne choisit pas ce qu’elle entend, et les sons qui lui arrivent peuvent modifier profondément notre état psychologique ou physique. Les premières recherches militaires et scientifiques sur l’impact du son sur l’organisme remontent à la Seconde Guerre mondiale, à une époque où les États-Unis s’inquiètent de l’avance de l’URSS dans le domaine du lavage de cerveau [3], et de l’inventivité nazie dans celui de l’armement [4]. La CIA, conjointement avec les services secrets canadiens et britanniques, se lance alors dans de savantes expérimentations sur les manipulations sensorielles, notamment auditives [5]. C’est surtout à partir des années 1960 que la recherche se structure – et dans les années 1970, les Russes développent des techniques de « psychocorrection », autrement dit de manipulation mentale, qui s’appuient sur les propriétés de l’audition afin de contrôler les dissidents, de les démoraliser, et de briser les émeutes. Dans les années 1990, les premières armes deviennent publiques, puis certaines d’entre elles, notamment dans les années 2000, trouvent une
application dans le domaine civil.
Avant d’entrer dans le détail, petit détour par la technique pour capter comment tout ça fonctionne.
Le son est une vibration acoustique dans un milieu élastique (solide, liquide ou gazeux) qui se
http://www.infos-paranormal.net/propage dans le temps et dans l’espace. Il est caractérisé par sa fréquence, son amplitude, sa vitesse.
Le spectre sonore se décline en fréquences (c’est le nombre d’oscillations de la vibration acoustique en une seconde), et l’unité de mesure de la fréquence est le hertz (Hz). Quand la vibration est rapide (fréquence élevée), cela donne un son aigu, quand la vibration est lente (fréquence basse), un son grave : le "la" du diapason correspond par exemple à 440 Hz [6]. Or, première caractéristique qui intéresse (notamment) les militaires, l’oreille humaine n’entend qu’une partie du spectre sonore : en gros, en dessous de 20 Hz (les « infrasons ») et au dessus de 20 000 Hz (les « ultrasons »), le son existe mais nous ne l’entendons pas. Entre les deux, c’est ce qu’on appelle le « domaine d’audibilité », ce qu’on entend : entre 20 Hz et 200 Hz (ou jusqu’à 500, selon les sources), c’est le domaine des basses fréquences (sons graves), entre 200 et 2000 Hz (ou 6000, toujours selon les sources) celui des fréquences moyennes (sons medium), et entre 2000 et 20 000 Hz des hautes fréquences (sons aigus). La capacité à entendre les basses et hautes fréquences varie d’une personne à une autre, selon l’âge et selon la santé. Par ailleurs, la sensibilité de l’oreille varie selon la
fréquence du son : l’oreille est moins sensible aux basses fréquences (le point le plus sensible se situant entre 3000 et 4000 Hz), et on perçoit mieux les fréquences graves et aigues à fort niveau.
Enfin, l’oreille a besoin de silence pour récupérer, et cet espace de silence doit être plus important lorsque l’on a subi de fortes intensités. Deuxième caractéristique notable : il n’y a pas que l’oreille qui perçoit les sons – en réalité, tout notre corps (et tout corps en général) y réagit : mets-toi près d’une enceinte qui crache des basses et tu sentiras tes intestins tressauter. Notre corps peut y compris percevoir une partie des infrasons et des ultrasons, inaudibles à la seule oreille. A vrai dire, pour que tes intestins tressautent, il faut jouer sur une autre propriété du son : non seulement sa fréquence (basse), mais son intensité (le volume). Elle se mesure, elle, en décibels (dB). 0 dB correspond au minimum que l’oreille humaine peut percevoir : c’est le « seuil
d’audibilité », et non le silence absolu. Tes chuchotements montent environ à 20 dB, ta machine à laver à 50 dB, une route passante à 80 dB, et un avion au décollage à 140 dB [7]. Le seuil de douleur arrive aux alentours de 120 dB (plus bas ou plus haut, cela varie selon les personnes, et selon les fréquences utilisées), mais l’oreille peut subir des dommages à partir de 85 dB. A 160 dB, tes tympans se déchirent, et à 200 dB tes poumons se fissurent. Le son, ça paraît immatériel, mais c’est tout ce qu’il y a de plus physique : à certaines fréquences et certaines amplitudes, le son a donc un impact plus ou moins fort sur les objets et notamment sur le corps humain.
Ultime précision avant d’aborder le concret : à chaque corps donné correspond une fréquence qui le fait vibrer de façon maximale, c’est ce qu’on appelle la « fréquence de résonance » (les fréquences harmoniques, qui sont des multiples entiers de la fréquence de résonance, font aussi vibrer un corps mais de façon moins importante). Chaque corps a sa propre fréquence. Le son, qui est une vibration de l’air (une onde), touche tous les corps autour de lui. Les corps transforment ça en énergie mécanique : ils vibrent - comme tes intestins, ou bien, pour prendre une image non sonore, comme la surface de l’eau quand on y envoie un caillou. Quand la fréquence du signal qui leur arrive coïncide avec leur fréquence de résonnance, ils vibrent de plus belle : si la Castafiore parvient à casser des verres, c’est que la fréquence qu’elle émet est la fréquence de résonance des verres – sous l’effet conjugué de la fréquence (la note), de l’intensité (le volume du chant de la Castafiore) et de la durée (elle sait tenir sa note), les verres vibrent de plus en plus fort, jusqu’à se briser. Même chose pour un pont qui peut être détruit par un vent faible si la fréquence de ce vent est la fréquence
de résonance du pont [8].
« Le fantôme dans la machine » : les basses fréquences et les infrasons
Même si le développement est aujourd’hui majoritairement orienté vers les armes à très hautes fréquences, c’est le domaine des infrasons et des basses fréquences qui a d’abord intéressé chercheurs et militaires. Et pour cause : les fréquences infrasoniques sont susceptibles d’entrer en résonance avec les fréquences propres du corps humain (les ondes cérébrales oscillent par exemple http://www.infos-paranormal.net/aux alentours de 7 Hz, le coeur à 72 Hz). Les infrasons sont présents partout dans la nature, à une intensité qui ne nous est pas dangereuse : les vagues de l’océan, les chutes d’eau, les volcans, les tremblements de terre, émettent ainsi des fréquences infrasoniques que les oreilles animales perçoivent d’ailleurs bien mieux que les nôtres (les éléphants entendraient ainsi à partir de 0,1 Hz, ce qui leur permet d’être passablement plus réactifs). L’industrialisation, avec son cortège de machines et de moteurs, a ensuite multiplié le nombre d’infrasons présents dans la vie quotidienne – et les nuisances liées à ce qu’on a ensuite nommé la « pollution sonore ».
La découverte du potentiel nocif des infrasons a été faite par hasard, par un acousticien français, le docteur Gavreau, qui officiait au Laboratoire d’électro-acoustique de Marseille. En 1957, il observe que les chercheurs de son équipe sont sujets à des nausées et des maux de tête aussi violents qu’inexplicables. Après moultes recherches, ils s’avisent qu’un ventilateur est la cause de leurs problèmes : la machine en tournant émettait une fréquence de 7 Hz qui, amplifiée par le conduit d’aération où elle était encastrée, devenait humainement insupportable quoiqu’inaudible. Gavreau du coup abandonne ses recherches en cours pour se concentrer sur les infrasons, leurs effets sur le corps humain, et les armes infrasoniques qui pourraient en résulter. Il construit un gigantesque orgue à infrasons qui, une fois démarré, fait vibrer tout le bâtiment, et cause à l’équipe de très sérieux spasmes intestinaux et pulmonaires durant plusieurs jours : les fréquences de l’orgue entraient en résonance avec les fréquences des organes internes, mettant ceux qui y étaient longtemps exposés en danger de mort [9]. Gavreau poursuivra ensuite ses recherches, dont une partie a été classée secret défense, en construisant sifflets et orgues de fréquences et d’intensité variables.
Une expérience similaire, quoique moins extrême et sans application dans le domaine de l’armement, est racontée par des chercheurs britanniques de l’Université de Coventry, Vic Tandy et Tony R. Lawrence, dans un papier intitulé « Le fantôme dans la machine » [10]. Vic Tandy travaille, en 1998, dans un laboratoire réputé pour être « hanté ». Très sceptique, Tandy observe néanmoins plusieurs phénomènes étranges : un sentiment de dépression diffus qui atteint les personnes dans une pièce précise, y compris lui-même, des frissons, les cheveux qui se hérissent sur la nuque, l’impression de voir des formes grises se déplacer furtivement dans la pièce. Le fantôme était en réalité encore une fois un ventilateur qui émettait un infrason. La fréquence était cette fois de 19 Hz, et, suffisamment amplifiée par la gaine d’aération qui l’entourait, faisait notamment vibrer les globes oculaires (d’où les apparitions grises et autres troubles de la vision) et induisait des difficultés respiratoires et un sentiment d’oppression diffus.
Cette « angoisse » infrasonique a d’ailleurs été analysée par des chercheurs britanniques s’intéressant aux causes scientifiques des sentiments religieux [11] : les infrasons (17 Hz, mais à un volume faible de 6 à 8 dB) produits par les orgues n’étaient pas tout à fait étrangers à la chair de poule, à l’augmentation du rythme cardiaque et autres manifestations spirituelles qu’éprouvaient les fidèles. L’industrie cinématographique a également exploité les fréquences infrasoniques ou les très basses fréquences : dans la première demi-heure d’Irreversible, Gaspard Noé a ainsi ajouté dans la bande son une infra-basse de 28 Hz (proche de la fréquence d’un tremblement de terre), à peu près inaudible, mais très efficace pour transmettre un incompréhensible sentiment de peur. La police états-unienne, pour améliorer sa capacité de persuasion, a, elle, équipée ses véhicules de « rumblers » (littéralement « grondement »), des sirènes qui utilisent, notamment, des basses (de 182 à 400 Hz selon le site du constructeur, Federal Signal Corporation [12]), faisant vibrer les
voitures et les personnes à proximité [13].
Le DEFRA (un équivalent britannique du Ministère de l’environnement) a produit en 2003 un rapport sur les basses fréquences [14], où il mentionne, parmi les effets sur le corps humain : le vertige, le déséquilibre, un sentiment de gêne extrême, la désorientation, l’incapacité d’agir, la nausée, les spasmes gastriques, la vibration de l’abdomen ou du coeur. Il indique également que des ouvriers exposés à des infrasons industriels de 5 à 10 Hz à un niveau de 100 à 135 dB pendant 15 http://www.infos-paranormal.net/minutes témoignaient de fatigue, d’apathie, de dépression, de pressions dans les oreilles, de perte de concentration, de confusion et de vibration des organes internes. Des effets sur le système cardiovasculaire et respiratoire étaient par ailleurs prouvés.
Les infrasons sont actuellement utilisés par les militaires comme outils de détection [15], mais comme armes à proprement parler, ils ne sont pas forcément pratiques, pour plusieurs raisons : les ondes infrasoniques sont longues, peu directionnelles, demandent beaucoup d’énergie pour avoir une certaine intensité et elles traversent les matériaux (tout comme les basses de la chaîne de ton voisin) – pas terrible quand on n’a pas forcément beaucoup d’énergie à disposition, qu’on veut viser une cible précise et accessoirement épargner l’opérateur de l’arme. Comme armes anti-matériel, les infrasons peuvent être efficaces, puisqu’ils ont la capacité, à forte intensité, de détruire un bâtiment – en revanche, ils ne sont pour l’instant pas utilisés (du moins publiquement) comme armes antipersonnel (contre des personnes). Il existe cependant des applications possibles, comme en atteste ce brevet, « Subliminal acoustic manipulation of nervous systems » [16] (Manipulation subliminale acoustique des systèmes nerveux – « subliminale » devant s’entendre non pas comme « magique », on y reviendra plus tard, mais comme « inconsciente »), déposé en 2000 aux États-Unis – son auteur mentionne, au titre des qualités de son invention, que « la fréquence sonore de 2,5 Hz peut induire le ralentissement de certains processus cérébraux, une somnolence et une désorientation. », et de conclure : « elle peut être employée comme arme non létale dans le cadre de missions de maintien de l’ordre. ». En 1998, une société maintenant disparue, Synetics Corporation, avait par ailleurs reçu du gouvernement
américain l’autorisation de développer [17] un rayon infrasonique « pouvant blesser ou tuer », et notamment utilisable comme « moyen non létal de contrôle des foules et d’autodéfense policière ou personnelle ». « Hell’s Bells » [18] La musique comme arme Le domaine d’audibilité, c’est-à-dire les sons qu’on entend, n’a pas attendu le XX ème siècle pour être exploité dans le domaine guerrier. La première référence est même biblique, c’est celle des murailles de Jéricho abattues par les trompettes et les cris de guerre des Hébreux [19]. On pourrait multiplier les exemples de ces usages martiaux du son, depuis l’armée écossaise, qui faisait
entendre son avancée plusieurs kilomètres à la ronde avec l’étrange musique de ses brigades de cornemuses, jusqu’aux policiers casqués-bottés qui tapent synchrones de la matraque sur leur bouclier avant une charge, en passant par les sirènes des Stukas de l’aviation nazie, hurlant dans le ciel d’Ukraine en août 1941, pour accompagner le bombardement de la colonne de civils et de soldats de l’Armée rouge qui fuyaient vers l’Est [20]. Le cinéma a abondamment puisé dans le potentiel spectaculaire et terrifiant du son – on se contentera de citer Apocalypse Now, où une Chevauchée des Walkyries à plein volume annonçait l’armée américaine dans le ciel du Vietnam. Lors de la Guerre du Vietnam, précisément, les Opérations Psychologiques (PsyOps) de l’armée américaine avaient de fait mis au point des techniques de démoralisation et de harcèlement par le son : certains hélicoptères étaient équipés de haut-parleurs qui diffusaient des cassettes mélangeant des phrases en vietnamien avec des effets spéciaux dignes des films d’horreur, censés terrifier le
peuple vietnamien. La plus connue de ces cassettes est sans doute celle intitulée « The wandering soul » (l’âme errante) [21], où un soldat mort revenait hanter le pays en suppliant les vietnamiens de rendre les armes et de ne pas risquer la mort loin de leur famille (dans la croyance populaire vietnamienne, si un corps n’est pas enterré sur sa terre natale et honoré par les siens, son âme ne peut pas rester en paix). Les
hélicoptères qui diffusaient ces sons recevaient généralement un feu nourri : non pas tant par superstition, que parce que les cassettes, diffusées de nuit et à fort volume, entendues partout et sans cesse, devenaient insupportables. Bill Rutledge, un aviateur engagé dans ces opérations, a ainsi conclu : « On était là pour tuer, et les cassettes des PsyOps nous y ont http://www.infos-paranormal.net/sacrément aidés. » [22] Pour citer quelques autres exemples, lors de l’invasion du Panama en 1990, la CIA envoie du Led Zeppelin ou du heavy metal jour et nuit pour déloger le général Manuel Noriega, grand amateur d’opéra, de l’ambassade du Vatican où il s’était réfugié - c’est à la demande du Saint-Siège que la musique cesse. En 1993 à Waco, le FBI balance de la musique à plein volume pendant plusieurs jours d’affilée pour faire sortir les membres d’une secte davidienne retranchés dans leur ferme. Les sons étaient choisis de manière à heurter les croyances des davidiens, avec notamment « These Boots Are Made for Walkin’ » de Nancy Sinatra, et les cris d’animaux égorgés [23]. Quand le chercheur Jonathan Pieslak, dans Sound targets : American Soldiers and Music in the Irak War (« Les cibles du son : les soldats américains et la musique pendant la guerre d’Irak ») [24],
s’intéresse au rôle qu’a joué la musique pour l’armée états-unienne dans la guerre d’Irak, les GIs avec qui il s’entretient lui parlent du rôle des baladeurs mp3 pour se reposer (« ça me relaxe ») ou au contraire se préparer à la guerre (« ça m’aide à devenir inhumain ») [25]. Ils lui parlent aussi de leur hommage grandeur nature à Coppola, quand ils ont préparé le siège de Falloujah en 2004 avec des blasters crachant du hard-rock [26] à plein volume dans les rues de la ville : les mollahs répondaient via leurs haut-parleurs avec des chants coraniques, et la ville ainsi bombardée par la musique était surnommée « LalaFallujah ».
Les véhicules américains étaient équipés de LRAD, Long Range Acoustic Device, littéralement des dispositifs acoustiques de longue portée : on s’y attardera dans le passage sur les hautes fréquences, mais on peut déjà en évoquer quelques caractéristiques. Le LRAD, développé par la société American Technology Corporation (ATC) [27], ressemble à une parabole, il ne reçoit pas de son mais il en émet, et il le fait à un très fort volume : au lieu d’un seul gros haut-parleur, il en combine, sur une surface concentrée, de multiples petits [28]. Résultat : la bestiole peut envoyer un son de 152 dB (l’équivalent d’un avion au décollage), en choisissant très précisément la direction du son, avec une portée allant de 100 à 3000 mètres (l’intensité du son s’atténuant à mesure). Comme ATC a tout prévu, on peut brancher diverses sources sur son LRAD : un micro pour envoyer des instructions à tout le quartier d’un seul coup, un lecteur CD ou mp3 ou, comme on le verra, un
générateur de très hautes fréquences. Le porte-parole des PsyOps, Ben Abel, indiquera ensuite à De
Gregory, un journaliste du Florida Times, à propos de l’usage d’armes soniques en Irak : « Ces missions de harcèlement marchent particulièrement bien dans un contexte urbain comme Falloujah. Le son n’arrêtait pas de rebondir sur les murs. (...) Ce n’est pas tellement la musique qui importait, mais le son. C’était comme envoyer un fumigène. L’objectif est de désorienter l’ennemi et de le rendre confus, afin de prendre un avantage tactique sur lui. » [29] Très récemment, en septembre 2009, les putschistes honduriens ont employé des LRAD pour envoyer de la musique à fort volume et des hautes fréquences sur l’ambassade du Brésil où s’était réfugié le président Zelaya [30] Qu’est-ce qui transforme le son en arme ici, qu’est-ce qui le rend terrifiant pour l’ennemi, et stimulant pour ses propres troupes ? Deux choses : son volume et son contenu culturel. Le volume, on l’a vu plus haut, peut avoir un impact très violent sur le corps humain. Surtout quand le son est joué pendant des jours et des nuits - « si vous pouvez gêner l’ennemi toute la nuit, sa capacité à
combattre est atteinte », souligne Abel dans le même article. Le son à fort volume vise par ailleurs à donner le sentiment d’une toute-puissance, à la fois technologique, et immatérielle : le son tombe du ciel et on n’y échappe nulle part. Comme l’indique un ancien colonel de l’aviation américaine, Dan Kuehl, toujours à De Gregory : « A peu près tout ce qui peut manifester votre omnipotence ou votre absence de peur permet de briser l’ennemi. » Pour ce qui est du contenu culturel, la musique permet là d’affirmer de manière violente son identité et sa volonté d’écraser l’identité de l’autre. La musicologue Suzanne Cusick, dans « Music as torture / Music as weapon » (la musique comme torture / la musique comme arme) [31], parle d’une « guerre des masculinités » à travers la création d’un champ sonore composé de musiques, le rap et le metal, « associées, par ceux qui ne s’y identifient pas, à la rage masculine ».
( source : infos-paranormal )